Did you forget to tell me something ? .(Lyn).

Un mois, une semaine et deux jours. Durant tout ce laps de temps, Donovan s’était plié aux règles promotionnelles de rigueur avant la sortie de son tout dernier film. Un scénario sans trop d’originalité mais qui tenait la route, une morale à la sauce américaine sur un sujet brûlant d’actualité. Bref. Entre les apparitions à plusieurs événements, les photos promotionnelles et tutti quanti, Donovan n’avait plus une minute à lui. Il vivait avec la désagréable impression de courir après le temps, tentant vainement de jongler avec sa vie de parfait citoyen lambda. Ce qu’il n’était plus désormais mais le jeune acteur ne semblait pas vouloir l’admettre. Hormis ses obligations professionnelles, tout semblait en suspend : sa vie de couple, ses relations, etc. En somme, Donovan n’avait plus aucune prise sur tout ce qui ne touchait pas, de près ou de loin, à sa carrière. Voilà le plus gros défaut de son métier.
Le jeune homme parvenait tout de même à garder les pieds sur terre et à laisser toute cette frénésie de côté une fois que ses obligations devenaient caduques. La journée d’aujourd’hui était la première de libre depuis ce qui lui semblait être une éternité. Fatigué par le décalage horaire entre Los Angeles et Paris, en plus de toute cette pression accumulée, Donovan s’était accordé une grasse matinée bien méritée pour commencer. L’avion de ligne s’était posé en milieu de soirée et, le temps de parcourir le trajet entre l’aéroport et sa maison, le soleil s’était couché. En somme, Donovan n’avait profité de rien sinon d’une dispute avec Solveig, autour d’un sujet devenu récurrent malgré lui. Sa prétendue infidélité. Ou plutôt, ses prétendues. Fatigué mais également lassé par ses griefs injustifiés, Donovan s’était muré dans un mutisme inhabituel. A quoi bon argumenter ? Il ne comprenait pas la raison de ses propos ni même son apparent manque de confiance. Une fois réveillé, Donovan avait pris son temps d’autant plus que la maison était vide et qu’un mot laconique de Solveig lui signifiait qu’elle ne rentrerait qu’en soirée. Autant de raisons pour ne pas se presser. Confortablement installé dans le lit d’un blanc immaculé, le jeune homme s’était d’abord intéressé à ses courriels puis aux messages que des dizaines de personnes lui laissaient chaque jour sur sa page Twitter. Auparavant, ce mode de communication lui était insupportable et inutile mais, avec le temps, il s’était aperçu qu’il n’y avait pas de meilleur moyen pour véhiculer quelques messages de citoyen responsable. L’environnement, sa priorité après le cinéma. Donovan rangeait ses messages dans deux catégories : les amicaux et les ... moins amicaux. Parmi ces derniers, un seul retint son attention. Le lien d’un article d’un célèbre magazine de presse à scandales. Probablement le plus vendu de toute la côte Ouest. Pourquoi diable prenait-il le temps de lire pareille stupidité ? Pour la simple et bonne raison que la rumeur de son infidélité ne faisait que enfler. A présent, il comprenait pourquoi Solveig était furieuse après lui. Blessé dans son égo, il abandonna son téléphone sur la table de chevet et passa les trois prochaines heures à oublier tout cela.

15 heures. Confortablement installé à la terrasse d’un café plutôt huppé, Donovan avait une vue plongeante sur la plage. Celle-là même où il venait de se baigner, à l’écart du plus gros de la foule. Là, il profitait de son habituel et indétronâble jus d’ananas, le regard perdu sur la ligne d’horizon. Autour de lui, la majorité des clients s’abritaient du soleil en usant des parasols mais lui ne semblait craindre ni l’insolation ni les coups de soleil. A cette heure-ci, il n’y avait que très peu de passage devant le café, la plupart des touristes se trouvant encore à la plage. C’est ainsi qu’il pu apercevoir la silhouette de Lyn, une amie de longue date à présent. Sa seule et unique amie journaliste. Plutôt ironique pour quelqu’un qui projetait de faire carrière dans le journalisme. Inconsciemment, Donovan mit de côté sa mission de discrétion et se leva à demi de sa chaise pour adresser un signe en direction de son amie. Leur dernière rencontre remontait à loin et il espérait bien que son emploi du temps lui permettrait de s’offrir une petite pause.

« LYN ! »

Affichant un air mi-désolé mi-gêné d’avoir parlé si fort, Donovan retrouva sa place tout sourire. Pour la discrétion, il pourrait repasser !

♦ QUEEN · **♦ QUEEN** It's a joke

Aujourd'hui, Lyn était sur le "terrain" comme on dit. Elle n'allait pas passer sa journée derrière ce fichu écran d'ordinateur qui lui explosait les yeux. Non, elle allait pouvoir se promener dans la ville, à l'affut de scoop et de photos intéressantes. Sans oublier d'aller scruter les magasins de maquillages pour faire quelques test afin de donner ses conseils à ses fidèles lectrices. Il y avait d'ailleurs bientôt un défilé de mode de prévu, et Lyn devait aller se procurer une invitation en VIP pour pouvoir prendre des photos et expliquer à ses lectrices qu'est-ce qui est tendance en ce moment. Elle s'était donc levée plus tard que d'habitude, et ça faisait du bien. Lyn n'avait pas vraiment de weekend, ni de vacances. Car partout ou elle allait, elle emportait son petit carnet et son appareil photo. Hors de question de rater un truc important ! Le soleil était venu la réveiller, se faufilant à travers ses volets. Ce qui la mit de bonne humeur d'ailleurs. Elle adorait l'été, elle avait l'impression d'avoir plus d'énergie. Après une bonne douche et un petit déjeuner léger, cafés et un yaourt, elle alla s'habiller, se coiffer et se maquiller. Elle releva ses cheveux ondulés dans une queue de cheval assez haute, laissant une mèche devant. Et elle enfila une jolie robe bleue. Perchée sur ses hauts talons, Lyn était toute fière. Elle sortie de chez elle, n'oubliant pas son matériel. D'habitude, dès qu'elle se rendait quelque part elle prenait un taxi ou sa voiture, car la marche à pied ce n'était pas vraiment ce qu'elle préférait. Mais là, c'était différent. En voiture, elle risquait de manquer des choses importantes. Elle posa ses lunettes de soleil sur son nez et c'était partis ! Elle avait décidé de remonter sa rue, puis de passer par Chinatown car elle savait que beaucoup de stars raffolaient des mets asiatiques. Puis évidemment, elle se faufilerait à Venice, avec un temps pareil les stars iraient certainement se faire dorer au soleil sur les plages ou boire un verre à la terrasse d'un café. Et ensuite, elle improviserait selon le temps restant et le nombre de choses qu'elle aurait déjà notée.

Et aujourd'hui, c'était sa journée. Les gens étaient de sortie et Lyn se régalait de potins et de photos. Surtout sur Chinatown où certaines stars faisaient une sortie familiale, avec l'époux(se) et les enfants. Voilà une chose qui intéressait pas mal ses lectrices. Ça leur donnait l'impression que finalement, les stars étaient comme tout le monde. Lyn avait la chance de ne pas franchement ressembler à une paparazzi, ce qu'elle n'était pas d'ailleurs ! Ou en tout cas, elle ne se considérait pas comme tel. Du coup, les gens se méfiaient moins d'elle. Elle passait presque pour une touriste un peu stupide de visiter la ville avec des talons pareils. Tant mieux s'ils pensaient ça, du coup elle se faisait plaisir avec son objectif. Puis, elle se retrouva bientôt à Venice. Elle tomba alors sur un grands magasins de maquillage. Elle afficha un sourire satisfait. Elle se dirigea vers l'accueil et présenta sa carte de journaliste. Une des employées l'emmena alors avec elle, lui fournissant de nombreux échantillons des derniers produits mis sur le marché. Elles bavardèrent un moment et Lyn lui demanda son avis sur certains produits, qu'elle prit bien soin de noter. Elle ressortit alors avec un sac remplis de produits de beauté. Un large sourire était affiché sur ses lèvres. Bon, à présent, direction les plages et les cafés. Elle marchait, le regard vif. Elle devait regarder partout autour d'elle pour ne rien louper. C'est alors qu'un cri la fit sursauter.

« LYN ! »

La jeune femme se retourna et aperçut alors Donovan, un acteur célèbre certes, mais également un ami. Chose assez improbable fut qu'il avait plutôt tendance à fuir les journalistes. Et qui sait, il aurait peut-être dû ne pas faire d'exception... Lyn afficha un grand sourire. Elle commençait à fatiguer, boire un verre ne lui ferait pas de mal. Elle se joignit alors à lui avec plaisir, amusé par l'air qu'il affichait. Tous les regards s'étaient tournés vers lui soudainement, et les gens s'étaient mis à chuchoter, certains semblaient l'avoir reconnu. D'ailleurs, une jeune femme préparait déjà une feuille et un stylo. Aucun doute, celle-ci allait venir lui réclamer un autographe. Lyn leva les yeux au ciel en voyant ça. Ça l'amusait un peu c'était vrai, mais elle trouvait ça pénible les gens qui venaient aborder les stars comme ça, alors qu'ils essayent d'êtres tranquilles. En attendant que la jeune fille se décide à venir voir Donovan, Lyn lui avait fait la bise et s'était assise en face de lui. Elle déposa son matériel sur la table, c'était lourd à force. Et puis, d'une voix enjouée elle lui demanda :

« Alors Donovan, comment vas-tu ? Tu prends une petite pause ? »

Un serveur arriva, lui demandant ce qu'elle voulait boire. Elle hésita et demanda finalement :

« Un café et un verre d'eau s'il vous plait. »

Que s’était-il passé dans la vie si bien réglée de ce jeune acteur pour s’attacher à une journaliste ? Une journaliste ! Deux choses. D’abord, Donovan ignorait complètement ce détail - pourtant si crucial à ses yeux - au moment de leur rencontre. Puis, comment faire marche arrière alors que Lyn était une personne particulièrement appréciable ? Cela dit, Donovan aurait facilement pu mettre ce trait de caractère de côté et refuser une quelconque forme d’amitié. Lui seul savait pourquoi il avait agi ainsi, conscient des éventuelles conséquences. Sa vocation première, celle d’être journaliste, demeurait un rêve inachevé, sa vie ayant pris un tournant inattendu. Alors, Lyn était la seule personne avec qui il pouvait partager cette passion démesurée pour le journalisme, hormis la presse à scandales.

Discrétion. Tout était bien affaire de discrétion lorsqu’il s’agissait de s’aventurer à l’extérieur. A le chasser, le naturel revint au galop et cet élan de spontanéité suffit à briser tous ses efforts pour passer inaperçu. Désormais, Donovan ne savait trop comment se comporter; rester sur sa lancée ou bien se rasseoir en adoptant un air tout à fait indifférent ? Finalement, il se mit à rire de sa propre bêtise. Lui qui voulait un peu de tranquillité, il pourrait repasser.
Il ne vit pas de suite la jeune fille déjà debout, trop occupé à détailler distraitement la robe que portait Lyn puis le sachet qu’elle portait. Plein à craquer. Instinctivement, il afficha une moue amusée et plissa les sourcils, étonnamment surpris.

« Bien .. un peu fatigué mais ça va. Je suis rentré de Paris hier au soir alors je m’octroie quelques jours de repos ! Et toi alors, tu as décidé de dévaliser les boutiques ?! »

L’une dans l’autre, discuter avec Lyn lui rappelait sa dispute de la veille. Après tout, comment ne pas y repenser en ayant une journaliste en face de soi ? Depuis quelques mois que la rumeur se propageait, tout ce que Donovan pouvait faire ou ne pas faire se retourner contre lui. Quelle que soit sa stratégie pour faire taire cette stupide et infondée rumeur, les médias semblaient s’en donner à coeur joie pour trouver ou inventer de nouvelles infos. En définitive, Lyn serait peut être sa seule et unique chance pour se faire entendre. Décidé à profiter de sa journée sans penser à quoi que ce soit, Donovan balaya ses pensées et se concentra à nouveau sur son amie. Tout du moins, il comptait le faire car une jeune fille, apparemment la vingtaine donc à peine plus jeune que lui, se présenta brièvement et lui demanda un autographe. Comme toujours, Donovan accepta avec plaisir et échangea même quelques mots. Cette jeune fille avait trouvé le courage de venir le voir, alors lui parler était la moindre des choses. D’ailleurs, il lui proposa de prendre un cliché au moment même où le serveur apportait la commande de Lyn. Elle le remercia ensuite et rejoignit son groupe d’amis, visiblement sur un petit nuage.
Le regard posé sur son amie, Donovan ne fit aucun commentaire à ce propos ni quoi que ce soit d’autre d’ailleurs. Leur amitié n’était pas nouvelle et pourtant, il lui arrivait encore de se montrer méfiant ou, du moins, masquer quelques unes de ses émotions. Un simple réflexe pour un homme encore peu habitué à se retrouver sur le devant de la scène.

♦ QUEEN · **♦ QUEEN** It's a joke

Lyn remercia le serveur lorsqu'il lui apporta sa commande. Elle le paya aussitôt et se reconcentra sur son ami. Elle prit une grande inspiration, et alors qu'elle expirait elle se laissa légèrement glisser sur sa chaise pour mieux s'installer et se décontracter un instant. Malgré la chaleur une petite bise fraîche venait apaiser ses joues brûlantes, ce qui était réellement appréciable.

« Bien .. un peu fatigué mais ça va. Je suis rentré de Paris hier au soir alors je m’octroie quelques jours de repos ! Et toi alors, tu as décidé de dévaliser les boutiques ?! »

Elle échappa un léger sourire amusé à cette remarque. Et alors qu'elle allait répondre elle vit la jeune fille finir par se décider enfin et s'avancer vers Donovan. Elle garda donc le silence pour le moment. Celui-ci se montra souriant et abordable avec elle. Lyn attrapa son appareil photo et immortalisa la scène en silence. Elle ne savait pas franchement ce qu'elle allait faire de cette photo. Pourquoi pas la publier ? Après tout, il n'y avait rien de compromettant à montrer un artiste signer des autographes. Au contraire, ça lui ferait une bonne pub et entretiendrait sa bonne image. En plus, il aurait peut-être besoin de ça en ce moment vu que la presse à scandale se déchainait sur lui et ses infidélités... La faute à qui ? Hmm, passons. Lyn souriait face à ce joli spectacle. Mais elle n'aimerait pas franchement avoir la même vie. Oh, elle ne dirait pas non à la célébrité, à la reconnaissance. Et c'était d'ailleurs dans ses projets. Mais être suivit par les paparazzis et être sans cesse abordé par des gens qu'on ne connait même pas tout ça pour mettre son nom sur un bout de papier n'avait rien de jouissif. Ou en tout cas, c'était son point de vue. Elle n'aimerait pas être dérangée sans cesse alors qu'elle recherche seulement de l'intimité et de la tranquillité. Être assaillie dès qu'elle quitterait son domicile ? Non merci. Tout ceci aurait pu arriver en plus. Lors d'un spectacle de danse alors qu'elle était à peine majeur, un agent était venue la voir. Il lui avait proposé de faire des essais photos en tant que mannequin pour produit de beauté. Elle avait gentiment refusé. Voir sa tête affichée partout et reprendre un slogan bidon ne la tentait franchement pas. La jeune finit par repartir, ne dérangeant pas l'acteur plus longtemps. Lyn but quelques gorgées de son café. Ce fut comme une bouffée revigorante, comme un coup de fouet. Cette boisson avait vraiment des effets magiques sur son corps et son mental, c'était impressionnant. Dès qu'elle en buvait, elle se sentait remplie d'énergie, prête à tout affronter. C'était comme une drogue pour elle, elle en avait conscience mais elle ne faisait rien pour changer ça. Sans le café, elle ne tiendrait jamais le coup. Et puis valait mieux du café qu'autre chose... Quoi que, niveau cardiaque ce n'était pas excellent. Enfin bref. Lyn se redressa sur sa chaise, tout sourire. Son visage était rayonnant, on sentait toute la bonne humeur et l'enthousiaste qui l'habitait. Elle répondit avec entrain :

« Presque ! Comme tu le sais certainement, je m'occupe de tout ce qui est mode dans l'Elite Magaszine. Et qui dit mode, dit beauté évidemment. Et donc, une fois par mois je me rend dans plusieurs magasins de cosmétiques et grâce à ma petite carte magique de journaliste on me donne plusieurs échantillons des derniers produits mit sur le marché. Je les teste, et je met mon avis dans le journal. Les lectrices apprécient d'avoir un avis avant d'acheter quelque chose de nouveau. Et moi, j'ai pleins de produits gratuitement ! »

Elle échappa un petit rire. Puis, elle revint sur sa phrase :

« Paris ? Oh, la classe ! J'adore cette ville. Les défilés de mode sont grandioses là-bas. Tu as aimé la ville toi ? »

Elle attrapa de nouveau son café et le descendit à plus de la moitié. Elle ne prenait pas franchement le temps de savourer. Puis elle tourna la tête sur la gauche, jetant un coup d'œil sur les plages. Elle le questionna :

« Quand on aura finit nos boissons, ça te tentera une petite promenade sur le sable chaud ? »